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Découvrez les créations littéraires de nos membres et ami(e)s de l'association.

Crédit photo: Christian Cros

CAINE

 

Ils m’ont dit: «On a appris des choses»

Et publiquement, ils ont parlé de leurs enfants

De leurs voyages, de leur consécration et de leur mariage

De leur carrière...et là, j’avais ma dose

 

Ils m’ont appelée Caïne

Celle qui dévore les hommes mariés

Celle qui les détourne

Sade Sade Sade Sade

La Vénus à la fourrure

Dans mon petit Ego ils ont taillé une grande blessure

C’est vrai

Au bout du téléphone il y a bien cette voix

Et il y a ces mots que je n’entendrai pas

Ces mots qui parlent d’enfants, de piscines et de grillades

Tendre cette voix: et là, je ne trouve aucune parade

 

Ils auraient bien voulu

Que je sois le Cyclope diurne à la fêlure

Mais lorsqu’ils m’ont découpée et mise à nue

Ils m’ont trouvée sans hache, sans Vénus ni fourrure

Et même avec mes taches

J’en suis sortie

sans une égratignure

Les Amants magnifiques

Sans doute tout cela n’est-il que chimères

Mais ce serait compter sans tes yeux,

Sans tes spasmes de joie, mon cœur que tout éclaire,

Ce silence qui porte un nom merveilleux.

Éternel silence qui me fait divaguer

Du champ jusqu’à l’église, au chapiteau du cirque

 Ainsi attachée à ta pensée,

 Je relis Les Amants magnifiques.

Je suis ta disgraciée; sous moi tout se dérobe;

Sans plus aucune estime, le Ciel me fait languir;

Le temps s’est arrêté, il est agoraphobe:

Crois-tu que le meilleur soit encore à venir?

​Ne regarde donc pas la poupée qui se brise

 

Je sonde le silence, mon très cher inconnu

La nature t’a repris dans l’ombre, son giron

Comme de t’avoir trouvé, et puis encore perdu,

J’ai l’impression d’un songe vil de Calderón

 

Ne regarde donc pas la poupée qui se grise

Ne regarde donc pas la poupée qui se brise

 

C’est une belle leçon de vie, me diras-tu:

Ne regarde donc pas la poupée qui se brise

C’est qu’à soi-même enfin on est toujours rendu

Livré à ses démons et à ses convoitises

 

Ne regarde donc pas la poupée qui se grise

Ne regarde donc pas la poupée qui se brise

 

Chaque homme porte en lui l’humaine condition

Je ne crois plus en rien… mais crois que tu espères

Sevrage pour pouvoir vivre l’amputation

Est-ce que les murs te tiennent quand tu es seul en guerre?

 

Ne regarde donc pas la poupée qui se brise

Ne regarde donc pas la poupée qui se brise

  1. Jubilatoire

  2. (J’ai découpé la viande d’un interview qui ne m’appartient pas)

  3.  

  4. À l’arrache l’art, à l’arrache!

 

  1. Fatigués, oscillants, absents,

  2. De vrais fantasmes,

  3. En présentiel, quelques otages

  4. En virtuels, cases multiples

  5. Outils de communication sincères et ravis qu’on les utilise

  6.  

  7. À l’arrache l’art, à l’arrache

  8. N’étaient-ils pas assez serrés, ces freins, pour qu’on se fâche?

  9.  

  10. Frustrés de ne pouvoir s’estimer qu’au travers de cases

  11. Incarcérés dans des écrans où l’assassin chaque nuit entre

  12.  

  13. Ne restait qu’à faire table rase

  14.  

  15. Table rase donc, table rase

  16. Table rase phrases, tables rases

  17.  

  18. Et maintenant qu’est-ce qui marche, qu’est-ce qui danse, qu’est-ce qui ose?

  19.  

  20. Personnages, convocations, personnages

  21.  

  22. Les protagonistes se sentent mal; ils vont se faire hara-kiri; ils ne croient plus à l’aventure,

  23. Ils s’épuisent à courir derrière des balles virtuelles

  24. Cherchant l’information qui, elle aussi, a ses états d’âme

  25.  

  26. Ils se terrent,

  27. Ils cherchent Pan,

  28. Gentil Pan, gentil

  29. Sinon Pan pan

  30.  

  31. Ruminant le silence cloîtré

  32. Les autres produisant encore de petits miracles

  33.  

  34. Les protagonistes de l’in-agir

  35. Créent un espace poétique

  36. (On s’y retrouvera quand tout sera machine!)

  37.  

  38. Tandis qu’ils agonisent leur fiction,

  39. Ânonnant le texte de la narration dominante,

  40. Ils se demandent si elles soupirent et pleurent,

  41.  

  42. Ces machines.

  43.  

  44. Fiction Net Fiction Breakfast Net Fiction. Mon corps, raide, dont on fait le siège,

  45. Siège des émotions, des débats et des barres de fer convenus,

  46. Communique avec d’autres corps via l’araignée propre.

  47.  

  48.  

  49. Grande expérience, grande expérience! Du cinéma, du Skype, de Zoom et Face-la Vraie Vie

  50. Le Suaire,

  51. Pas nécessaire car énorme expérience de l’écran.

  52.  

  53. Besoin d’une grande ouverture.

  54.  

  55. Enfermés à l’idée de s’ouvrir à une nouvelle forme

  56. Ils ne faisaient pas le deuil de se toucher, de faire théâtre,

  57. Ils ne jouaient plus avec la profondeur de champ,

  58.  

  59. Peur d’aller vers l’inconnu et d’être gourds,

  60. De faire de faux pas et d’être sourds,

  61. De se tromper et de tourner court.

  62.  

  63. Pas de mauvaise foi,

  64. Non: voilà qu’ils prospectaient statiques.

  65. Peur d’aller vers ce qu’on ne contrôle pas.

  66. Fahrenheit s’efforçait pourtant toujours de contrôler,

  67. Surfant sur l’onde,

  68. Maxime! J’ai eu trente ans!

  69.  

  70. On le la contrôle pas, la Vie, c’est comme une dent

  71. Disait Mâchin,

  72. Tantalons

  73. De la servir.

  74.  

  75. À l’arrache l’art, à l’arrache

  76. N’étaient-ils pas assez serrés, ces mors, pour qu’on les mâche?

  77.  

  78.  

  79. Après plusieurs essais, quelques-uns ont bien songé arrêter

  80. Les autres repartant pourtant tambours battant,

  81. Des accordeurs ceux-là,

  82. Ils se sont retirés, micros éteints,

  83. Ils ne voulaient pas non plus qu’on les arrête

  84.  

  85. Qui étaient les protagonistes, qui?

  86.  

  87. On dé-confinait les déconfits

  88. Mais les esprits ouverts ne se laissaient pas démonter,

  89. Disaient-ils,

  90. C’était Tatline, ascension verticale et baroque, révolutionnaire, presque soviétique

  91.  

  92. Maiakovski au triangle amoureux, marquant la fin du concert, se suicidait

  93. On célébrait des formes hybrides

  94.  

  95. La fantaisie des religieuses portugaises MMS secrètes

  96. Jetant des bouteilles à la mer polymorphes, un bouquet de choses, aimant toujours,

  97. Un bouquet de choses qui ne sont pas là mais qui pourraient être là.

  98.  

  99.  

  100. Mise à nue,

  101. Ce qu’on demande à la comédienne,

  102. Mise à nue,

  103. La magie s’ouvrait à de nouvelles expériences

  104. On perforait le rien, les commentaires et les petits trous,

  105. On faisait le journal du vide et des gamelles des chats errants,

  106. Soit tu vas vers cette fiction, ou tu n’es pas là, et rien n’est possible.

  107.  

  108. Avec six mille kilomètres de distance, on se mâtait dans de petites cases,

  109. On n’était pas dans le même espace, dans le même instant,

  110. Les décalages Vin contre café, crépuscule du matin et crépuscule du soir.

  111.  

  112. Pas le même espace, ni les mêmes horaires, ni les mêmes langues,

  113. Où non de Dieu mort la pièce s’était-elle jouée?

  114.  

  115. C’était des étrangers dont le parcours et la vie parallèle servaient la pièce.

  116. Soeur Endipity faisait exploser la réunion et ça nous faisait rire

  117. On attendait que les animaux reprennent l’écran

  118. La machine était intégrée à outrance.

  119. On jouait la situation

  120. La galerie éclatée, révélant encore beaucoup

Laid cran, mille possibilités!

 

Des gens très concentrés se posaient les bonnes questions

De doutes égotistes on piétinait les champs virtuels

Chacun faisait sa cuisine personnelle, on changeait les scénographies

Mastiquant, on baisait entre deux fauteuils pliables

On trinquait, on bouillait à l’intérieur et on trinquait,

Chacun de nous sa part de monstre.

 

À défaut de crever à l’écran, on tâchait de passer de l’autre côté et de crever l’écran,

youtube.com/watch?, youtube.com/watch?,

On donnait son avis

Son avis d’Avatar

 

À l’arrache l’art, à l’arrache

Et qu’on raccroche comme des Apaches

​

Joëlle Montech

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